Séquence Ce6
(Zone à Metoicoceras geslinianum et Zone à Neocardioceras juddii). Elle s’étend du HG Antifer 1 à la marne Pimont 1.
Cet intervalle est particulièrement important car il concerne 2 questions largement débattues : l’épisode OAE2 et la limite d’étage Cénomanien/Turonien.
L’événement anoxique OAE2 se produit vers -96,6 Ma, c’est-à-dire vers la fin du Cénomanien. Au cours de celui-ci, les océans s’appauvrissent en oxygène et une grande quantité de matière organique est séquestrée dans les sédiments profonds sous forme de black shales. Les up-wellings de ces eaux sous-oxygénées sur les plates-formes vont induire la disparition d’environ 27% des genres marins (mollusques, foraminifères planctoniques, nannoplancton). Sur les plates-formes et dans les mers épicontinentales, l’usine à carbonates se met au ralenti. Les dépôts condensés et les hardgrounds vont donc y prédominer. La bordure continentale que constituait la Normandie à l’époque est particulièrement affectée par la réduction de la sédimentation, dans une plus forte mesure que ne le sont des zones un peu plus profondes (Boulonnais, Sussex).
Une excursion positive du δ13C marque l’épisode OAE2. Ceci tient au fractionnement isotopique opéré par les végétaux : les végétaux s’enrichissent préférentiellement en carbone 12 ou carbone « léger ». Si la matière organique « légère » est séquestrée dans les sédiments alors, par différence, le carbone « lourd » devient plus abondant dans l’environnement. Le δ13C augmente de 2 à 7°/°° dans toutes les phases du carbone (carbone organique marin et terrestre, carbonates).
L’OAE2 est considérée comme la cinquième plus grande extinction des 600 derniers millions d’années.
Des publications récentes décrivent ces niveaux : FERRÉ (1995), ROBASZYNSKI et al. (1998), MOREL (1998), succédant à d’autres plus anciennes : JEFFERIES (1963), JUIGNET (1974). La coupe de référence de la séquence Ce6 se situe à environ 200 m au Sud de l’accès à la Valleuse d’Antifer. D’autres coupes peuvent être réalisées :
- à la Valleuse du Fourquet,
- dans la descente au terminal pétrolier d’Antifer,
- dans des panneaux éboulés entre Saint-Jouin et Cauville,
- au pied de la falaise du Cap Fagnet.
Les logs stratigraphiques faits par les différents auteurs sont parfois ambigus. La terminologie employée ici tente d’être plus précise. Chronologiquement (du bas vers le haut), on distingue les niveaux suivants :
- La marne mA4 (sur la surface d’érosion sub-plenus de JEFFERIES) est un niveau irrégulier, généralement double (mA4a et mA4b) mais pouvant être plus complexe, enrobant des lentilles de craie aux bords flous ;
- Le HG Antifer 1a (ou HG Antifer 1 de JUIGNET). Un premier niveau de hardground recouvre la marne mA4. C’est un calcaire noduleux clair traversé profondément par des terriers remplis par la craie marneuse grise sus-jacente. Cette craie contient, de manière caractéristique, d’abondants graviers verdis ;
- La marne mA5 grise, à bords peu nets, parfois double ou triple ;
- Le HG Antifer 1b : calcaire clair traversé de terriers gris, avec des Spongiaires et d’assez gros silex parfois à cœur noir ;
- La marne mA6, grise à Zoophycos ;
- Le HG Antifer 2 : niveau double de hardground.
La partie inférieure est la plus caractéristique, appelée initialement HG Antifer 2 par JUIGNET (et désignée HG Antifer 2a ici). Elle est formée d’un calcaire clair entièrement perforé de terriers recouverts par un enduit vert vif. Cette propriété n’est partagée qu’avec les Hardgrounds Tilleul du Turonien. De gros nodules verdis se détachent à la partie supérieure. Ce hardground correspond au niveau 11 de MOREL (1998) avec un maximum de Mn.
La partie supérieure (HG Antifer 2b) présente des bioturbations gris clair et est couronnée par une surface d’érosion.
Le HG Antifer 2a contient Metoicoceras geslinianum, Sciponoceras gracile, Actinocamax plenus, débris d’Inoceramus pictus.
Le HG Antifer 2b contient : Metoicoceras geslinianum, Euomphaloceras septemseriatum, Orbirhynchia multicostata, Orbirhynchia wiesti.
R. cushmani disparaît au-dessus du HG Antifer 2.
Le HG Antifer 2 peut correspondre au Bed 3 de JEFFERIES (1963) ; - Le niveau Jumel : marne grise bioclastique à radioles de Cidaris (épaisseur 15 cm), formant une encoche claire caractéristique dans la falaise. Cette marne correspond au pic principal du δ13C des mesures de MOREL (1998) ou son niveau 13. Cependant, des mesures isotopiques plus serrées gagneraient à être faites autour de cet intervalle assez riche en organismes benthiques. Ceci permettrait peut-être d’identifier la phase froide temporaire de l’OAE2 (Plenus Cold Event) ;
- Le HG Antifer 3a : calcaire très noduleux (ébauche de hardground) avec débris d’ I. pictus. De rares Actinocamax plenus ont été trouvés dans le HG Antifer 3 (s.l.). Une surface d’érosion au sommet du HG Antifer 3a forme un joint de décollement franc, au niveau duquel les blocs de craie se détachent de la falaise. Ce joint se manifeste par des surplombs ;
- Le HG Antifer 3b : calcaire clair avec gros terriers au sommet ;
- Le HG Antifer 3c : calcaire à nodules recouverts d’une patine glauconieuse. Le contact entre Antifer 3b et 3c n’est pas franc. Présence de nodules pyriteux à une quinzaine de cm du sommet. Neocardioceras juddii et nombreux radioles de H. vesiculosa. Le sommet du HG Antifer 3 s.l. est considéré comme la partie sommitale du Bed 7 (AMÉDRO & ROBAZYNSKI, 2001) ;
- L’ Horizon A de JUIGNET : conglomérat à éléments de craie (20 cm) puis craie noduleuse claire, sans discontinuité de stratification, d’épaisseur moyenne 0,8 m. La présence de M. nodosoides, ammonite turonienne, signalée par MOREL (1995) devrait être confirmée ;
- La marne Pimont 1 : craie marneuse à structure flaser. C’est la première discontinuité au-dessus de l’horizon A et elle est peu marquée. Elle renferme également de grandes ammonites Fagesia catinus.