Les blocs et l’héritage hercynien
Le Bassin parisien est un bassin flexural intra-plaque. Les sédiments méso et cénozoïques reposent en discordance sur un socle cadomien-varisque. Ce socle appartient à 4 domaines paléogéographiques varisques, limités par des failles ou des chevauchements varisques (= hercyniens, le cycle hercynien débute au Dévonien et finit au Permien) :
- le domaine armoricain AD (armoricain central et bloc cadomien), limité par la Faille du Bray au Nord;
- le domaine interne ID (zone liguro-arverne et zone morvano-vosgienne), au Sud et au Sud-Est;
- la zone saxo-thuringienne STZ, à l’Est, limitée au Nord par la Faille de Metz et au Sud par la Faille de Vittel;
- la zone rhéno-hercynienne RHZ au Nord, limitée au Sud par la Faille Bray-Vittel.
Le soubassement des sédiments mésozoïques du NW du Bassin Parisien est accidenté par 5 grandes lignes de fracture qui ont été remobilisées au cours de l’histoire de ce bassin.
- La faille de la Seine (N150) et ses prolongements vers le Sud que sont les failles de la Loire et de Sennely (d’orientation N-S). Vers le Nord, elle se poursuit par l’intermédiaire d’ une petite faille (faille de Pavilly d’orientation N70) par la faille de la Manche (dénommée à terre Faille de Fécamp-Lillebonne), faille courbe de direction globale EW.
- La faille du Bray qui délimite le bloc cadomien au Sud-Ouest et la zone rhéno-hercynienne au Nord-Est. Elle est la seule faille sur le profil Ecors à traverser la croûte supérieure et le MOHO (Cazes et Toreilles, 1988). Elle est considérée comme un ancien décrochement ductile dextre hercynien. Cette faille est largement inversée durant le Crétacé terminal-Eocène développant un demi-anticlinal sur sa marge SW. Les profils ECORS montrent une faille subverticale, à léger pendage vers le Nord-Est, qui s’étendrait jusqu’au Moho. Elle est également affectée par un décrochement dextre. Cette faille se prolonge à l’Est par la faille de Bouchy. La faille du Bray est sismogène avec pour référence le séisme du 1er décembre 1769 ( Io = VI-VII ; h = 12 km, M = 4,8 – BRGM, 2008).
La faille du Bray se poursuivrait au S de l’île de Wight et se traduirait par des failles inverses en échelon redressées et des périclines (Wyns et al., 2016). La vallée de l’Arques à Dieppe peut être implantée sur la faille du Bray. Il semble cependant que le rejet vertical soit très faible. Le pendage seul vers l’W pourrait satisfaire une continuité stratigraphique. Mais il n’interdit pas un rejet horizontal dextre qui pourrait expliquer la forte fracturation et la karstification de la falaise occidentale. - La faille d’Eu, se traduisant dans la couverture par l’anticlinal de Gamache.
- La faille de la Somme, accident parallèle à la faille de Bray. Elle se traduit dans la couverture par le synclinal de la Somme et dans la croûte sur 30 km d’épaisseur. Cette faille a été repérée dans le profil ECORS du Nord de la France.
- La zone de cisaillement Nord-Artois correspondant au front varisque marque la limite entre la zone rhéno-hercynienne et le bloc de Brabant . Des séismes récents sont localisés sur cette zone. Plus de précisions sont données par le CEA sur le séisme de mai 2015, en particulier le mécanisme au foyer. Le BGS donne un mécanisme décrochant contrairement à l’interprétation du CEA.
Sur son bord nord-est, le bloc cadomien est accidenté par la faille de Lillebonne -Fécamp. Cette faille individualise un sous-bloc vers le SW, appelé bloc de Caux. Celui-ci joue de manière différentielle, soit en en s’affaissant soit en se surélevant, au cours du dépôt de la craie.
Déformation de la surface de base de la craie
Failles à l’origine de périclines
Un contexte compressif s’installe au Crétacé supérieur, lié à la collision des plaques ibérique, africaine et européenne. Il s’affirme après le Turonien. La direction de la compression est N-S ou NE-SW. Un certain nombre de failles anciennes, comme la faille de Bray-Vittel, réagissent en transpression. La couverture de sédiment fraîchement déposée réagit en se plissant. Ce sont les périclines.
Au niveau de Dieppe, la faille du Bray ne montre pas de rejet vertical notoire estimé (peut-être même opposé au rejet apparent visible au coeur du Pays de Bray). Par contre, cette faille doit avoir un rejet horizontal conséquent, mais invisible car masquée par la large vallée de l’Arques.
Remarquer sur la figure précédente que la Faille de Fécamp n’est pas interprétée comme courbe (voir carte géologique marine ci-dessus) et qu’elle rejoint la Faille du Bray.
Etat du Bassin Parisien avant l’instauration du faciès craie
Cette carte, tirée de Amédro et al., 2014, montre les aires et les faciès sédimentaires identifiables dans le Bassin Parisien à l’Albien moyen. La transgression crétacée n’a pas encore atteint son maximum. La plupart des zones sensibles tectoniquement vont perdurer au Crétacé supérieur.
Liens
Evolution morphotectonique récente du Bassin houiller Nord-Pas de Calais dans le cadre de l’Europe de l’Ouest
Etude d’un site de stockage – rapport BRGM
Héritage structural et déformation de couverture : plissement et fracturation tertiaires dans l’Ouest du bassin de Paris (Olivier Lacombe, Daniel Obert, 2000)
Bonjour,
pensez vous que le secteur de Romilly sur Seine, croisement des accidents de Vittel- Saint Martin et Bray puisse avoir bougé au quaternaire, comme le laissent supposer les nombreuses déformations observables da
dans les terrasses alluviales et dont l’intensité diminue en s’éloignant de cette zone.
Cordialement.
Pierre Benoit
La zone faillée Vittel – Bouchy – Bray – Wight – Canal de Bristol, de même que la Zone de Cisaillement Nord- Artois, sises sur des accidents hercyniens profonds pouvant atteindre le manteau ont rejoué au Crétacé supérieur et au Cénozoïque en cisaillement horizontal ou en transpression. Qu’elles puissent encore être actives au Quaternaire ne m’étonnerait donc pas. Je ne connais cependant pas d’études qui aient abordé de tels éventuels effets dans les formations subactuelles du Pays de Caux.