Sous-séquence (?) Ce3a (zone à Mantelliceras dixoni).
Elle s’étend du début du HG Bruneval 1 au sommet du HG Bruneval 2b. Ces deux hardgrounds sont liés à une activité érosive variable, en intensité et en position. Les variations latérales de la sous-séquence Ce3a sont importantes.
Deux faits liés peuvent être constatés :
1) vers le Nord, les hardgrounds Bruneval 1 et 2 sont très bien marqués dans le paysage. En se déplaçant vers le Sud, ils deviennent moins nets. C’est particulièrement le cas pour le HG Bruneval 1 qui perd son individualité au Nord d’Octeville ;
2) vers le Nord, une plus forte et longue activité des deux hardgrounds conduit à une condensation de la sous-séquence. Ainsi, à Bruneval, les hardgrounds Bruneval 1 et 2 sont directement superposés.
1. Secteur de Saint-Jouin-Bruneval
La coupe de Saint-Jouin-Bruneval est d’un accès très facile. Nombre d’auteurs (hors JUIGNET) l’ont donc considérée comme représentative du Cénomanien du Pays de Caux. En cet endroit, les deux hardgrounds Bruneval 1 et Bruneval 2 sont superposés et ont été généralement globalisés en un ensemble unique HGs Bruneval 1&2. En fait, un déplacement vers le Sud montre que l’intervalle temporel qui les sépare est plus important.
Entre le Nord de la Valleuse de Bruneval et la descente au terminal pétrolier, la sous-séquence Ce3a peut être touchée directement en coupe dans la falaise vive. Elle ne mesure que 1,3 m. La moitié supérieure constitue le HG Bruneval 2. La moitié inférieure est une craie marneuse recouvrant le HG Bruneval1. Dans cette marne sont dispersées des reliques de silex. Dans ce secteur, le HG Bruneval 2 est unique (non-subdivisé) et il est coiffé d’un enduit limonitique caractéristique.
Au Sud de la plage de Saint-Jouin, les observations se font essentiellement sur les panneaux éboulés. La falaise vive, épisodiquement visible, permet une vérification à distance.
Le HG Bruneval 1 est faiblement fossilifère, avec de rares ammonites à la patine verte caractéristique dont Schloenbachia varians, Acompsoceras renevieri, Mantelliceras saxbii, M. picteti et M. dixoni.
Le hardground est recouvert par un double (parfois triple) niveau de craie marneuse claire, riche en débris fossiles : Discoides subuculus, Holaster nodulosus, Catopygus columbarius, Epiaster crassissimus, Entolium orbiculare, Pycnodonte vesicularis. Les Inoceramus virgatus prévalent au sommet de cette marne supra-Bruneval 1.
2. Secteur entre Saint-Jouin et Cauville
Les 2 hardgrounds Bruneval 1 et 2 étant bien repérés, on peut suivre leur évolution en progressant du Nord au Sud.
À l’extrémité S de la plage de Saint-Jouin, un niveau de silex s’intercale entre le HG Bruneval 1 et le HG Bruneval 2. Puis, en progressant vers le Sud, d’autres silex s’ajoutent.
Au S de la Valleuse de Cauville, on compte jusqu’à 11 niveaux de silex, dont 8 bien différenciés. Cette série de silex est désignée ici “silex Cauville” et elle correspond à la majeure partie de la sous-séquence Ce3a. L’équivalence est probable avec “The Bank of limestones”, une série de gros bancs calcaires qui apparaît au Southerham Grey Pit dans le Sussex ou à la baie de Compton dans l’île de Wight (MORTIMORE et al., 2001). Dans la numérotation des couplets de GALE (1995), le rapprochement se fait avec l’intervalle B12 à B22. Dans le Boulonnais, la correspondance peut également se faire avec les bancs à virgatus du repère R5 (AMÉDRO & ROBASZYNSKI, 2001). En Allemagne, WILMSEN (2008) considère que ces couches se sont déposées pendant un événement de MFS, le “Schloenbachia / I. virgatus Event”.
Une subdivision parmi les silex Cauville peut se faire d’après leur teinte. Ainsi, localement au Tronquay, on distingue :
- les Silex Cauville inférieurs noirs (sCi1 à sCi3),
- les Silex Cauville médians gris (sCm1 à sCm3),
- les Silex Cauville supérieurs noirs (sCs1 à sCs5).
Les silex Cauville inférieurs sont fréquemment mal conservés et ont une forme irrégulière. La particularité du silex sCi1 est d’avoir une structure spongiforme.
Trois des silex Cauville supérieurs sont particulièrement épais (sCs1 à sCs3). Ils forment un triplet caractéristique dans la falaise vive.
Le silex sCs1 se distingue des silex sCs2 et sCs3 par sa structure :
– sCs1 est tabulaire. Il montre un cortex épais et plat (particulièrement le cortex inférieur). Un joint net se place à une dizaine de centimètres au-dessous ;
– sCs2 et sCs3 ont une forme irrégulière (Thalassinoides).
La faune est peu abondante (Holaster nodulosus, grandes ammonites Parapuzosia ).
Au Sud de la descente du Tronquay, les silex Cauville restent visibles épisodiquement en falaise ou sous forme de panneaux de petite dimension.
À partir d’Heuqueville, et jusqu’à la Hève, le HG Bruneval 2 se dédouble. Un silex s’intercale entre les deux parties. Lorsqu’il est utile de les distinguer (voir ci-après), nous les désignons HG Bruneval 2a et HG Bruneval 2b.
3. Secteur entre la descente de l’OTAN et La Hève
- Les silex Cauville
Ils sont bien représentés en falaise et dans quelques panneaux décamétriques.
De même qu’à Cauville, une succession en 3 parties s’observe : les Silex Cauville inférieurs, noirs ou spongiformes, les silex Cauville médians, gris, les Silex Cauville supérieurs, noirs.
- Les silex Cauville inférieurs sont compris entre les joints 4 et 5 (notés silex n° 7 et silex n° 8).
Le silex n° 7 peu épais, constitué d’une double plaque grise.
Le silex n° 8 est le plus remarquable : par sa forte épaisseur (de l’ordre de 40 cm), par sa forme irrégulière très découpée et par sa texture spongiforme. De loin, les coeurs noirs et les cortex clairs arrangés de manière chaotique lui donnent un aspect ponctué. Des paramoudras traversent fréquemment ce silex. Sa position stratigraphique en fait un équivalent probable du couplet B11 ou repère M5 de GALE (1995), encore désigné « The Rib » en Angleterre.
Entre les silex Cauville inférieurs et médians se place une couche de marne grise épaisse et régulière formant une encoche remarquable (joint 5). - Les silex Cauville médians sont constitués de 3 bancs de teinte grise uniforme. Le banc inférieur est particulièrement épais, ce qui permet de le reconnaître aisément.
- Les silex Cauville supérieurs sont réduits à environ 3 bancs. Ils semblent avoir été partiellement “digérés” par le HG Bruneval 2 à leur partie supérieure.
Notons deux particularités, propres aux silex Cauville de ce secteur, qui peuvent aider à leur reconnaissance sur le terrain :
- la première particularité est relative aux joints de stratification : certains joints marneux nets servent de plans de décollement privilégiés pour les blocs éboulés. Le morcellement des panneaux effondrés conduit à des blocs de différents intervalles stratigraphiques, limités par ces joints. Sur les figures, nous avons numéroté les joints principaux, par exemple :
– joint 1, à la base du banc de silex Saint-Andrieux,
– joint 7, entre les silex Cauville médians et supérieurs. - la seconde particularité est un faciès ichnologique apparaissant dans les silex Cauville supérieurs, entre Le Tronquay et La Hève. Les interbancs crayeux entre les silex sont affectés par une lamination ondulée et discontinue que l’altération et le lavage par le mer mettent en relief. Nous avons utilisé le terme imagé de “couche à frisure” pour décrire ce faciès. La vue du plan de stratification atteste qu’il s’agit de réseaux de terriers horizontaux, aplatis, superposés et plus ou moins silicifiés. De telles couches à frisure sont présentes dans les silex Cauville supérieurs (appelées ici frisures inférieures, cfi1 et cfi2) mais également au-dessus du HG Bruneval 2 (frisures supérieures, cfs1 et cfs2). Ce faciès est proche des “laminated structures” du JUKES-BROWNE Bed 7 (voir ci-après).
- Le HG Bruneval 2
Ce hardground est un des plus caractéristiques. On peut le toucher en place de chaque côté de la Valleuse de Bruneval, ainsi que sous le Grouin et dans la descente au terminal pétrolier. Mais plus souvent, il se rencontre sous forme de blocs éboulés, entre les caps d’Antifer et de La Hève. Il est généralement assez épais, de l’ordre du mètre, mais il peut atteindre jusqu’à 1,5 m. Il présente souvent une surface supérieure ferrugineuse continue, ce qui permet de le distinguer du HG Bruneval 1 qui peut néanmoins présenter ce type d’enduit, mais de manière discontinue. Le HG Bruneval 1 est également plus glauconieux que le HG Bruneval 2 (un moyen mnémotechnique de s’en souvenir : 1 verre “vert” 2 rouge).
Lorsque son épaisseur est forte (à partir d’Heuqueville vers le Sud), un niveau marneux vient clairement scinder le HG Bruneval 2 en deux parties, d’où la distinction d’un HG Bruneval 2a et d’un HG Bruneval 2b. Cette marne peut servir de joint de décollement dans les blocs éboulés et elle offre alors à la vue de belles surfaces à ammonites (surtout Acompsoceras). L’existence de 2 hardgrounds superposés avait été constatée par JUIGNET (1974), mais il avait interprété le hardground inférieur comme le HG Bruneval 1 (avec pour corollaire la nécessité de créer un HG Heuqueville surnuméraire).
Au Sud de Cauville, un silex intercalaire vient même s’ajouter entre le HG Bruneval 2a et le HG Bruneval 2b. Il s’agit bien de deux épisodes séparés dans le temps.
Le HG Bruneval 2 renferme :
– des Céphalopodes : Neohibolites ultimus, Schloenbachia varians, Mantelliceras dixoni avec souvent le centre phosphaté de couleur orange, grandes Acompsoceras renevieri très souvent mal conservées ;
– des Échinides : Discoides subuculus, Holaster nodulosus, Epiaster crassissimus, Catopygus columbarius, Hemiaster bufo, Pseudholaster sequanicus, Tetragramma variolare, Polydiadema bonei, Tiaromma michelini, Salenia petalifera, Hirudocidaris vesiculosa. Crassiholaster bischoffi, n’est rencontré que dans ce niveau ;
– des Bivalves : Merklinia aspera, Neitheia quinquecostata.
En Allemagne, les imprégnations ferrugineuses sont communes au sommet de la Zone à mantelli (LEHMANN et al., 1995).
Le HG Bruneval 2 est considéré ici comme équivalent :
- du « Double Limestone » ou couplet B23-B24 ou repère M6 dans le Sussex (GALE, 1995),
- des “dixoni limestones” de WRIGHT et al. (2017),
- du “bipartite limestone” de la carrière d’Hoppenstedt en Allemagne (WILMSEN, 2007b),
- du repère R6 (2 bancs crayeux décimétriques à Éponges) dans le Boulonnais (AMÉDRO & ROBASZYNSKi, 2001),
- des couches 508-516 de la coupe de Blieux dans le SE de la France (REBOULET et al., 2012).