Variation des isotopes stables de l’oxygène
L’oxygène comporte plusieurs isotopes stables dont 16O et 18O qui sont les plus abondants (respectivement 99% et 0,2%). Cet élément est présent dans la plupart des milieux naturels (eau, carbonates).
Lorsque l’eau de mer s’évapore, la molécule H216O plus légère passe plus facilement en phase vapeur que la molécule lourde H218O. La vapeur d’eau a un déficit d’environ 1% d’ 18O par rapport à l’eau des océans. Les masses d’air humide tropical sont transportées vers les pôles et subissent des condensations successives qui les appauvrissent en oxygène lourd. Corrélativement, elles s’enrichissent en oxygène léger.
L’abondance relative en 18O s’exprime par le paramètre δ18O (en pour mille, normalisé PDB).
Il existe une relation linéaire entre la moyenne annuelle des température et le δ18O des précipitations. On peut donc se servir du δ18O comme d’un « thermomètre isotopique » pour étudier les paléoclimats. Les mesures s’effectuent soit sur la glace (périodes récentes), soit sur les carbonates (périodes anciennes). Dans ce dernier cas, on pratique l’analyse :
- soit sur roche totale,
- soit sur les tests de foraminifères planctoniques (température des eaux de surface),
- soit sur les tests de foraminifères benthiques (température des eaux profondes).
En période froide, il y a enrichissement en 18O de l’eau de mer (et donc des tests carbonatés). Le δ18O est plus élevé.
En période chaude, il y a appauvrissement en 18O de l’eau de mer (et donc des tests carbonatés). Le δ18O est plus faible.
Par exemple, les calcaires de Gubbio (Italie) ou de Caravaca (Espagne) ont des valeurs de δ18O négatives oscillant entre -4‰ (plus chaud, niveau marin plus élevé) et-2,5‰ (plus froid, niveau marin plus bas).
L’analyse des calcaires pélagiques profonds fournit des données climatiques précieuses. La craie est plus problématique car elle s’est principalement déposée sur des plate-formes continentales enrichies par des apports d’eau douce et elle a subi précocement une forte bioturbation qui l’a remaniée.
Les premières études comparées du δ18O entre les craies anglaises et la scaglia italienne sont dues à Jenkyns et al. (1994).
Dans les formations thétysiennes de l’Himalaya (Wendler et al.,2009), on constate une augmentation générale du δ18O au cours du Crétacé supérieur, donc un refroidissement des températures. Un réchauffement s’y produirait à la limite Coniacien-Santonien ou au début du Santonien, suivi par un refroidissement au Santonien moyen et supérieur.
Wiese & Voigt (2002) constatent 2 phases de refroidissement au cours du Turonien supérieur. Ils présentent une figure qui reprend différentes études régionales couvrant l’intervalle Cénomanien – Coniacien. On peut y constater que la courbe de Jenkyns et al. (1994) pour les craies du Kent montre un réchauffement des températures au cours du Cénomanien jusqu’à la limite CT à partir de laquelle les températures vont globalement chuter. Cette constatation est moins évidente pour d’autres régions.
On remarque sur cette figure des valeurs « froides » au-dessous et au-dessus des marnes Southerham.
La figure suivante est modifiée d’après B. Haq (2014) rapportant des données roche totale de D. Schrag sur la coupe de Contessa (Italie).