Le craies phosphatées
Les dépôts marins phosphatés, ce qui est exceptionnellement le cas de la craie, contiennent des minéraux du groupe des francolites (Jarvis et al., 1994). Il s’agit de carbonate-fluorapatites de formule complexe.
Des gisements de phosphates sont connus dans le département de la Somme. Il s’agit de sables phosphatés résultant du lessivage superficiel et de la concentration en nodules jaunes de phosphates inclus dans la craie. Plus au NE, dans le Bassin de Mons, il existe des concentrations de phosphates dans la craie (craie de Ciply et de Saint-Symphorien).
Dans le Bassin de l’Hallue, des craies phosphatées sont décrites à la limite Santonien moyen – Santonien supérieur, ainsi que dans un Campanien assez élevé.
En Angleterre, des craies phosphatées sont connues aux tunnels de Stonehenge, à Boxford , Winterbourne et Taplow dans le Berkshire (Mortimore, 2012).
Selon Jarvis (2006), les craies phosphatées du Nord de la France (Beauval, Orville, Nurlu, Villers-devant-le-Thour) et d’Angleterre se sont déposées entre le Santonien moyen et le Campanien inférieur. Les grains phosphatés consistent en des tests de foraminifères, en fragments de macrofossiles, en pelotes fécales, en intraclastes et en restes de vertébrés.
Les phosphates ne peuvent pas provenir de la précipitation directe à partir de l’eau de mer (0,07 ppm) mais sont généralement d’origine organique. Les tissus organiques peuvent fixer jusqu’à 1% de leur masse, soit un enrichissement d’environ 100 000 fois par rapport à leur milieu ambiant, l’eau de mer. Le phosphore, dissout à la mort des organismes, enrichit la boue et précipite en phosphates du groupe des apatites, sous forme de petits grains. La forte densité de ces minéraux les rend très sensibles à l’action des courants. Ils se concentrent dans des placers par vannage des minéraux plus légers qu’eux.
Les couches phosphatées apparaissent au sein de cuvettes d’érosion, de dimension inférieure au kilomètre, ravinant les craies blanches coniaciennes et santoniennes.
Les teneurs en P2O5 varient de 5 à 20%.
Toujours selon Jarvis, ces craies se sont formées dans une mer ouverte, balayée par des courants, de salinité normale, avec des eaux de surface à forte productivité organique. La dégradation bactérienne de la matière organique fournit le phosphore. La précipitation du phosphate se produit sur les grains carbonatés, dans la boue crayeuse à faible distance du fond sous-marin, lors d’épisodes régressifs avec d’intenses upwellings.
L’influence des courants d’upwelling, enrichis en phosphore, dans la formations de gisements de phosphates est signalée ailleurs dans le monde. C’est le cas, par exemple, des phosphorites du Coniacien supérieur – Santonien d’Equateur (Brookfield et al., 2009) que les auteurs associent à l’événement anoxique OAE 3 (interstratification dans des shales organiques). C’est encore le cas des phosphorites du Crétacé supérieur du Moyen Orient (Abdulkader M. Abed, 2013), lesquelles se sont formées au S de la Néo-Téthys et sont associées ici aux phases transgressives (TST de la stratigraphie séquentielle).
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